Moustachat ! Quelle bonne surprise ! Dans mes bras !

Monsieur le curé ! Je ne vous fait pas la bise mais le cœur y est !

Aie ! D’habitude je n’ai rien contre les franches accolades mais là j’ai un de ces mal de dos !

Je vous préviens : si vous voulez me donner mon cours de danse ici, c’est moi qui dirige !

Non ce n’est pas ça : c’est interdit de monter dans le clocher, les allemands risquent de vous tirer dessus !

Ah : c’est votre façon a vous de me raccompagner vers la sortie !

Je vois que vous m’avez emmené un balai : ça tombe bien !

C’était plus pensé comme une arme. Qu’est ce qui est tombé ?

C’est plutôt remonté et ça a battu des records mais vous ne me croiriez pas !

Moi je monte a la corde de dix mètres en quinze secondes !

Et qu’est ce que c’est que ce bouquet de pâquerettes entre vos dents ? Ce n’est pas pratique pour parler.

Je n’ai pas le courage de les jeter.

Et pourquoi vous les jetteriez ? Elles sont très belles !

Belles et tristes : elles se referment.

Nous allons leur trouver un joli verre a vin au presbytère : elles vont se rouvrir. Venez, ne restons pas là.

C’est pour manger.

Ah c’est gentil : je n’avais pas encore pris mon petit déjeuner. Descendons ! Vous allez bien en goutter quelques unes avec moi ?

Ah ah ah, vous êtes drôle monsieur le curé, apprenez moi !

« Emmanuel », Moustachat , appelez moi «  Emmanuel ».

Vous êtes drôle Monsieur Emmanuelle, apprenez moi !

Mais pas besoin : vous êtes très drôle Moustachat, pourquoi vous pleurez ?

Je ne sais pas. C’est Fanfan.

Oh non ce n’est pas vrai ! Qu’est ce qu’il a encore fait ?

Rien : c’est lui qui m’a donné le bouquet de pâquerettes pour le mouton.

Le mouton du méchoui ?

Oui mais moi je l’ai déjà tué  le mouton !

Mais bien sûr ! Soyez certain qu’il va plus apprécier ça que si on l’avait mangé vivant !

Vous êtes drôle monsieur Emmanuelle, apprenez moi !

Moustachat ! Appelez moi « Emmanuel » tout court.

Vous êtes drôle Emmanuelle tout court. apprenez moi !

Ah ça c’est drôle !

Quoi donc ?

Moustachat ! Vous me faites marcher ? C’est drôle de m’appeler « Tout court ! ».

Ah non ça ne me fait pas rire, ça me fait penser que toutes les lettres du corbeau commencent par «  Il court il court le curé »

Vous avez des lettres du corbeau ?

Il n’a pas besoin de m’écrire puisque je ne lis pas votre langue.

Vous ne voulez toujours pas que je vous apprenne ?

Vous en faites déjà tant pour moi !

Vous savez, si tout le monde rendait les lettres a Madame la factrice, le corbeau n’existerait plus.

Il existe et il dit que vous courez parce que vous avez la chiasse !

Non Moustachat : ce n’est pas un joli mot. Et puis il n’a jamais dit ça. Les gens brodent.

Et qu’est ce qu’il faut dire alors ?

Euh…rien, on ne le dit pas !

Si je tenais le corbeau, je le tuerais.

Allons, il ne faut pas dire ça non plus. C’est peut être un proche ou un ami qu’il faudra pardonner !

Dans mon pays on lui couperait les mains. Comme ça il ne pourrait plus écrire ses cochonneries.

Et pourquoi pas les pieds ?

Vous êtes drôle Emmanuelle. Et la tête pour qu’il n’écrive pas avec la bouche !

Non : là Moustachat, ce n’est plus drôle ! Mais c’est ma faute : c’est moi qui ai commencé.

Ici on va lui faire payer une amande ou même peut être lui faire faire un ou deux jours de prison.

C’est la justice qui décidera.

Quand je l’ai vu sortir de votre grenier, j’ai sauté sur le vélo de Bébert sans même prendre le temps de mettre mes chaussures.

C’est du sang sur vos pieds ?

Celui du mouton !

Au fait, vous ne boitez plus quand vous mettez une de mes chaussures.

Excusez moi : je voulais gagner du temps !

Mais c’est très bien, vous devriez m’en acheter une, vous seriez mon premier client ! J’ai toutes les couleurs !

Ah non : moi j’aime bien boiter ! Parce que Dieu m’a fait comme ça !

Bébert est chez le boucher ?

Non : seulement son vélo ! D’ailleurs il ne faut pas que je traîne pour lui ramener car je n’ ai pas attendu sa permission.

Moi qui comptait vous demander si vous n’auriez pas des talents de serrurier : j’ai perdu mes clés.

Refermer la porte du clocher ? Mais je vous fais ça en…euh…disons cinq secondes ! 

Non ? Moustachat ! Vous êtes incroyable !

Avec le fil de fer là, celui attaché autour de la poutre.

Non n’y touchez pas : il est brûlant ! Descendez, je le dénoue et je vous rejoins.

Attention : il est en train de vous scier la poutre qui soutiens la cloche !

Je vous me prêteriez le balai ?

C’est celui du boucher !

Oui : je le lui ramènerai, je dois justement aller le voir !

C’est celui de sa maison, pas de la boucherie !

Je dois aller le voir dans sa maison !

Pour parler de quoi ?

De choses très sérieuse !

Il faut s’attendre a du changement ?

Il faudra peut être s’y préparer oui !

Attention aux pièges : il en a mis partout ! Et aussi au gendarme qui guette le loup : l’eau de sa gourde est rouge.

Tout ce qu’il va arriver a faire, c’est mettre le feu a sa planque de paille.

C’est une prédiction ? Parce qu’ alors, il faut que je vous emprunte votre pelle pour taper sur le feu !

Non, mais c’est tellement probable avec lui qu’il me fait dire des bêtises.

Vous auriez du demander du fil et une aiguille a Marguerite. Il va falloir lui recoudre le pied quand il aura marché dans un piège !

Moustachat, comprenons nous bien : il n’y a pas de Marguerite, c’est Fanfan qui m’a aidé a… comment dire… descendre la vierge du clocher.

Ah : vous avez mangé Marguerite ?

Mangé Marguerite ?

Fanfan m’a dit : «  les pâquerettes, c’est pour le mouton, Monsieur le curé, lui, il a déjà sa Marguerite ».

Alors ça Moustachat, ça ne se dit pas non plus, Fanfan parfois, manque de finesse en croyant faire de la poésie !

Et qu’est ce qu’on dit ?

On ne le dit pas ! Je n’ai pas mangé Marguerite !

J’essayais d’être drôle !

Ah oui, mais je vous assure que vous l’êtes ! Moi ! Manger Marguerite !

Ah oui il a parlé d’une rose ! C’était plutôt une rose ! Ça s’effeuille une rose ?

On va manger les pâquerettes c’est très bon Madame Lazare en met parfois dans sa salade !

Vous me tenez le cache serrure levé s’il vous plaît ? Merci !… Le fil de fer ?… Merci ! Vous comptez ?

…Scri…scri…scric…

Cruntch cruntch cruntch…

Un.

…Scri…scri…scric…

Cruntch cruntch cruntch…

Deux.

Cruntch cruntch cruntch…

…Scri…scri…scric…

Trois

Cruntch cruntch cruntch…

Clic

Quatre.

Cruntch cruntch cruntch…

…Scri…scri…scric…

Cinq

Cruntch cruntch cruntch… Attendez : il faut que je double le fil de fer !

Ah !

Il se tord : trop mou ! C’est quoi ? On dirait de l’or !

Houlà! Je serais riche : c’est moi qui l’ai fait !

Il faudrait le montrer a votre frère quand il reviendra mais lui c’est le fer qui l’intéresse !

Vous avez des choses a dorer ! Prenez le ! Mais ne le faites pas fondre : si ça trouve c’est aussi de l’explosif.

Montrez lui d’abord ! Vous comptez ?

…Scri…scri…scric…

Un.

Cruntch cruntch cruntch…

…Scri…scri…scric…

Cruntch cruntch cruntch…

Deux.

Cruntch cruntch cruntch…

…Scri…scri…scric…

Trois

Cruntch cruntch cruntch…

Clic

Quatre.

Cruntch cruntch cruntch…

…Scri…scri…scric…

Cinq .

Scri…scri…scric…

Clac

Cruntch cruntch cruntch…et voilà  le travail !

Moustachat, Vous êtes un génie ! Qu’est ce que vous ne savez pas faire ?

Danser et être drôle. Heureusement vous, vous êtes mon génie de la lampe. Mon petit Jésus a moi !

Ah ah ah ! Il vous reste un troisième vœux.

Non : vous ne pouvez pas rendre les gens amoureux.

D’autant plus que vous ne voulez pas me dire qui est l’élue de votre cœur.

Cruntch cruntch cruntch…Dans mon pays certains parents marient d’abord et disent que l’amour viendra après.

Dans beaucoup de pays et ça s’est déjà vu ici aussi !

Cruntch cruntch cruntch… A Merlan Cloche ?

Moustachat, il vous faut garder le troisième vœu pour me libérer, j’appartiens a tout le monde.

Et c’est pour eux que vous courez : vous trépignez déjà !

Je vous comprend moins bien quand vous mâchez comme ça !

Cruntch cruntch cruntch…Pardon ?

Il reste des pâquerettes ?

Oh pardon : j’ai failli tout manger pendant que je travaillais sur la serrure. D’habitude je me mâche la langue ! Tenez !

Merci ! Il m’en reste suffisamment !

J’ai failli pêcher par gourmandise ! Un bon croyant doit savoir partager !

Votre aimée verra a quel point vous savez voir ce qui manque aux autres. Et savez y pourvoir.

Voir et pourvoir ! Peut être que votre roi remonté au ciel me ferait chevalier au grand cœur !

Vous l’êtes peut être déjà a ses yeux !

Et si ma fleur de Jasmin préfère les grands aux serviteurs ?

Vous êtes peut être déjà grand a ses yeux aussi !

Et votre Dieu ? Il ressuscitera le mouton le jour du jugement dernier ?

Mais c’est le votre aussi : nous avons le même !

Si Fanfan le lui demande, ça ne fait aucun doute ! C’est un ange !

Je ne vous le fait pas dire ! Puis un mouton c’est somme toute assez sage.

Les béliers beaucoup moins ! Il va me falloir aller rechercher le mouton avant midi !

Vous ne finissez votre curetage du canal bouché avant ?

Vous, vous avez vu monsieur le maire !

Il m’a juste dit que vous alliez commencer votre journée plus tôt pour finir le canal avant ce soir.

Je ne suis pas un pion qu’on déplace ! Le mouton c’est un cadeau de la mairie en l’honneur d’une nouvelle habitante.

Moi je vous parle de ça parce que les anciennes annoncent un orage pour cette nuit !

Le mechouî : c’est la priorité !

Tant que ce n’est pas le déluge !

Tout le monde gardera les pieds au sec ! Je vais chercher le mouton ! Ça monte mais tant pis !

Je peux aussi le faire !

C’est ma mission ! Pas la votre !

Attendez ! Le bouquet! C’est un cocktail, il n’y avait pas que des pâquerettes !

Du poison ?

Presque : de l’herbe du diable !

Qu’est ce qui va m’arriver ? Je vais m’endormir ? Pour toujours ?

Non ne vous inquiétez pas ! Vous ne vous en apercevrez même pas !

Que je vais m’endormir pour toujours ?

Non : je me suis mal exprimé je voulais dire qu’il y en avait tellement peu que ça ne vous fera rien !

Mais qu’est ce qu’il a en ce moment  Fanfan ?

Il a « l’adolescence ».

L’adolescence ? Je croyais qu’il avait dix huit ans !

Vous plaisantez ! C’est ce qu’il dit ! C’est un enfant trouvé, personne ne sait son âge et ça l’arrange bien pour se grandir !

Il ne va quand même pas devenir comme son père ?

En tout cas nous sommes sûrs d’une chose, c’est qu’il ne sera pas boucher.

Mais pas la poissonnière  quand même !

Moustachat ! Fanfan est toujours derrière toutes les portes !

Il a trouvé son maître : l’allemand est même derrière les fenêtres !

J’ ai bien trouvé Pinpon dans ma cheminée !

Il ne faut pas colporter les rumeurs ! Vous voulez bien ? La poissonnière n’en a même pas eu avec le poissonnier ! Dieu ait son âme !

Ce n’est pas le même roux celui du boucher et celui de Fanfan !

Je n’ai pas trouvé les lutins ni la sirène !

Alors vous avez fait la cigogne !

L’ancien curé ! Saunières ! Moi je n’étais que l’enfant de chœur !

Il passe vous voir le cardinal cette année ?

Oui ! Rappelez vous bien : la procession n’existe pas!

Oui : ni les gitans ! Donc encore moins le cirque !

Mais le cirque n’existe pas non plus ! On ne les reverra plus ces gitans là !

Dire que même le corbeau ne trouvait aucun mal a dire de Fanfan !

Le corbeau le fait exprès pour qu’on en déduise que c’est Fanfan le corbeau.

Ah oui : c’est rusé ! Puisque le corbeau ne peut pas dire du mal du corbeau !

C’est une piste ! Sauf si c’est pour brouiller les pistes !

Vous savez comment le corbeau m’appelle ?

Non, et je ne veux pas le savoir !

Le croque mort !

Moustachat, je vous avais dit non !

Si ça peut aider ! A le pister !

Dites moi plutôt a quoi ressemblait notre corbeau ce matin ?

A une fourmi : j’étais à des kilomètres ! 

Racontez moi tout dans les moindres détails !

J’étais en train de gonfler le mouton pour séparer la peau de la chair.

Ah ! Oui ; notre méchoui !

Je pompe, je pompe, je ne sais pas pourquoi, je balaie l’horizon du regard, peut être parce que le pauvre mouton n’est pas beau a voir.

Oui. j’imagine. Passons !

Puis je vois qu’ une échelle est posée sous la fenêtre de votre grenier.

Ah ! Bien sûr ! L’échelle.

Alors tout en pompant je me dis : « Tiens, Monsieur le curé a trouvé un moyen pratique pour aller où il veut a l’heure qu’il veut sans que les allemands lui demandent des comptes. »

Ça aurait pu oui mais ce n’est pas ça. 

Alors tout en pompant je me dis que quand même ce n’est pas un plan parfait puisque de chez le boucher moi je vois le derrière du presbytère.

Bien vu.

Parce que quand même il faut travailler, je continue a pomper toujours et encore quand tout a coup je me dis « Ah justement le voilà ! »

Et non : c’était la fourmi !

Sûr : ce n’était pas vous vu qu’elle avait une cape.

J’aurais pu mettre une cape !

Pour moi c’était une femme !

Tiens donc ! A cette distance.

Oui ! Comme on peut être trompé a un mètre, j’ai été convaincu a un kilomètre.

Ça ne relève que de l’intuition !

Et alors a ce moment le mouton explose parce que j’avais trop pompé et la fourmi me regarde.

Elle a entendu le mouton exploser ?

Oui, et marqué un temps d’arrêt !

Déjà nous savons que notre fourmi n’est pas sourde ! Continuez !

Et alors en trois secondes : une pour glisser le long de l’échelle …

Notre fourmi est une athlète !

Sans les mains ! Notre fourmi est peut être la femme qui fait du trapèze en maillot !

Ne me parlez pas de malheurs : ces gens là j’espère qu’on ne les reverra jamais ! Où en étions nous ?

Une seconde seconde pour gambader comme un coureur de haies par dessus les broussailles.

Nous irons voir si elle n’y a pas accroché quelques bouts de sa cape !

Et enfin une dernière pour disparaître dans la forêt.

Avec un peu de chance, il pourrait y avoir semé quelque chose pour nous.

Oh non : il volait au dessus des épines comme un corbeau !

En étendant ses ailes ?

Non ! Mais ça ne l’empêchait pas de faire des bonds d’un mètre cinquante !

Mustachat allons : c’est impossible !

Ah! Vous me demandez de raconter : je raconte.

Les broussailles où mon coq c’est fait attaquer par le renard ? Derrière le presbytère ?

Celles qui font un mètre cinquante !

 Comme si il portait quelque chose contre lui ?

Moi a cette distance je ne veux rien affirmer !

Un sac ?

Quelque chose contre le ventre ! De léger !

Coton ? Laine ? plume ?

Une oie ! Vous n’aviez pas une oie? Je ne l’ai pas vu !

Non je n’ai pas d’oie !

Ah d’accord c’est pour l’ours j’ai compris !

Non ! Je n’ai pas d’ours non plus et si j’en avais un je ne lui donnerais pas mon oie !

C’est peut être une gitane qui avait faim ! Ou alors c’est son ours qui avait faim !

Est ce que vous pouvez éviter de parler de montreur d’ours sur le parvis de l’ église. Ça va me porter malheur ! Rappelez vous ! Il n’y pas de procession !

Je vous dois deux vœux : nous réparerions ça avec mon génie dans la lampe !

Vous êtes drôle Mustachat ! Je lui demanderais d’abord la paix dans le monde ! Où en étions nous ? Notre corbeau ?

Seul un homme peut être aussi fort mais comment un homme peut être aussi léger !

Un chat maigre ! Comme vous !

Musclé et maigre comme un clou !

Un homme de fer ! La couleur de sa cape ?

Dans le petit matin tout était encore gris !

Rouge ! Ce serait possible !

Comme la cape de l’apprenti torero ?

Le fils de Gachoucha ? Mais qu’est ce qu’il fout celui là ! Il n’était pas épicier chez les allemands !

Mais ils ne sont pas allemands ! Ils vont rentrer chez eux !

Et c’est où chez eux ? Il vous l’ont dit !

En tout cas le boucher l’ a pris comme apprenti !

Donc cape grise : vous m’avez dit tout était gris !

Peut-être un reflet roux ! A peine : comme le bleu peut l’être au corbeau !

Non : noir comme un corbeau !

Et Pinpon ? Il est où Pinpon ? Quand je dis ça je n’accuse pas : je questionne !

Il espionne  ! Il chasse le pyromane !

Quel pyromane ?

Celui qui a lâche des Montgolfières inflammables qui ont mis le feu a la montagne !

Ah déjà ce n’est pas lui !

Heureusement le nouveau colonel serait capable de le fusiller !

Les vents ont du tourner !

Si c’est Pinpon qui fait l’imbécile il faudra dire que vous n’avez vu qu’un chat perché !

Déjà avec sa cape, on sait que ce n’était pas l’ours !

Et vous aimez bien les chats ! 

Parce qu’un ours dans sa grotte quand ça vous griffe, ça marque plus qu’un chat !

Mais laissez ce pauvre ours qui n’existe pas tranquille !

Quand il aura attrapé la main d’un enfant, il n’aura plus qu’a tirer pour avoir le reste !

Mais il mange comme un goret ! Du poisson ! de la confiture ! Il mange mieux que nous !

Il s’est échappé ? Parce que il va nous bouffer quelqu’un il n’a pas peur de l’homme

Au fait ce n’est pas le bras qu’il a mangé a son dompteur. Le corbeau n’y était pas, moi : oui !

Ah oui : la Grèce.

Rome ! Les jeux du cirque ! Il ne recommencera pas ! 

Il s’est excusé ?

Il a été exusé !

Non mais de toute façon il n’a jamais été question que la fourmi soit un ours !

Oui, donc, on en était que vous avez croisé le regard d’une fourmi !

Oui et j’ai défriché en un temps record un nouveau chemin des chèvres, le vélo de Bébert en grince encore.

C’est vous que j’ai entendu freiner ?

Je devais faire au moins du soixante dix kilomètres a l’heure !Oui : quand j’ai croisé Madame la factrice qui montait chez monsieur le marquis !

Et Fanfan était avec elle ?

Il m’a dit de vous dire que non ! Parce que vous n’aimez pas qu’ il aille chez le marquis !

Et c’est vrai ?

Bien sûr : ils se sont séparés pour finir plus vite et aller se baigner ensembles.

Ah vous avez eu le temps de discuter un peu quand même !

Pas du tout : dés qu’elle m’a dit qu’elle ne vous avait pas vu ce matin. J’ai bondi !

Ah bon !

Comme ce n’est pas normal puisque d’habitude elle vous vois tout les matins : j’ai pédalé de plus belle.

Est ce que vous avez eu l’impression que notre voleur voyageait léger ?

Pourquoi ? Il vous manque des choses ?

Deux ou trois bricoles !

Vous n’avez plus un seul meuble dans la maison : je m’excuses mais vous cherchant partout, je n’ai pu que le constater !

J’ai tout mis dans la chambre de la nouvelle bonne : la pièce fermée a clé !

Je vous ai cherché partout dans le presbytère !

Sauf dans la pièce fermée a clé !

je vous ai cherché partout dans l’église, même dans le puits.

Vous m’avez appelé de derrière la grille ?

J’ai même écouté si je n’entendais pas grogner !

Vous entendez des voix dans le clocher et vous voilà ! Vous avez bien fait ! Est ce que vous avez refermé la porte du presbytère ?

Absolument pas ! Si elle avait été fermée a clé je crois que je l’aurais enfoncée !

Tout ça votre balai a la main et votre bouquet entre les dents !

Voir et pourvoir !

Il y a une étiquette avec l’écriture de l’épicière !

Combien ?

Dix francs !

Oh la voleuse !

L’épicière ouvre déjà ? Vous l’avez vu ?

C’est Bébert il m’ a dit : « Tu balayeras toute cette merde  !

Le mouton !

Alors je lui ai dit :  » Tu n’en a pas ? « 

Et il vous a demandé de lui en rapporter un !

Vous savez que les pâquerettes, c’est très bon pour ce que vous avez ?

Qu’est ce que j’ai ?

Dans le dos !

Ah oui : les contusions, on ne peut rien vous cacher Moustachat !

Il faut dire aussi que… si je puis me permettre,… comment dire… votre robe s’y prête un peu.

Quoi ? Qu’est ce qu’elle a ma robe ?… Oh putain !

Oh c’est drôle de vous entendre dire un gros mot.

Ah mais depuis ce matin, je n’arrête pas !

En même temps si vous découvrez que c’est une robe de dame que vous avez sur le dos plutôt que la votre, ça se comprend !

Je vous dois une explication : une dame qui veut rester anonyme…

Oui : moi je ne l’ai pas vue et je ne veux pas savoir qui c’était !

Oui : c’est gentil Moustachat, cette dame a du m’enlever ma robe pour observer mon dos tuméfié…

C’est bien ce que je vous disais : si j’étais arrivé plus tôt, elle aurait pu vous le masser avec des pâquerettes.

j’étais sonné, elle a interchangées nos robes, c’est une mauvaise blague et je lui en veux beaucoup !

Et moi je m’en veux beaucoup de ne pas être arrivé plus tôt !

Vous me croyez ?

Et pourquoi je ne vous croirait pas ? Dieu joue avec les gens qu’il aime.

Heureusement que le ridicule ne tue pas !

Je me mets a votre place !

En même temps Moustachat, a vous aussi je vous en veux : vous auriez pu me le faire remarquer plus tôt !

Mettez vous a ma place !

Oui ! Difficile de dire a un fou qu’il est fou !

Vous avez une autre aube ?

Chez madame Lazare. J’y cours, je ne vais pas courir après la dame.

J’ai vu Marguerite elle court après Bébert. Il lui manque toujours quelque chose a celui-là !

Vous n’avez rien remarqué ?

Elle était bien habillée : une joli robe noire ! Et un chapeau noir comme Napoléon !

Mon royaume pour une robe !

Voir et pourvoir, prenez mes habits !

Ah ah ah ! Et vous, qu’allez vous mettre ? Ma robe ?

Non : mon bleu de travail ! Il y a combien entre la porte de l’église et la porte de mon cabanon a outils ?

Je suis preneur, je vous attends en robe !

Je crois que je serai mieux sans mes habits !

Ah non : ça suffit pour aujourd’hui ! Allez y je vous regarde mais de grâce : courrez habillé !

Je ne me suis jamais senti aussi léger que depuis que j’ai abandonné mes chaussures : j’ ai envie d’ aller plus loin !

Oui mais nous ne sommes pas seuls ! Vous allez aggraver une épidémie de berlue qui a déjà bien commencée !

J’ai l’ivresse de l’action : mon sang court dans mes veines ! Moi aussi je veux courir ! Et pour la bonne cause !

Mais Moustachat ! les pâquerettes vous montent a la tête ! Vous ne boitez pas quand vous courez ?

Pas le temps !

Oh ça alors, j’aimerai bien voir ça !

Et les gens n’auront pas le temps de me voir non plus ! Sept secondes !

Et vous ne comptez pas le temps d’ouvrir la porte ?

Je ne la ferme pas ! Je ne vais pas enfermer le génie alors qu’il est déjà enfermé dans sa lampe !

Il va vous manquer un tonneau et une corde ! Le tonneau est dans mon jardin ! J’espère qu’on ne vous a pas pris le génie dans la lampe.

Impossible : il m’appartient ! Donnez moi le clap de départ avec vos mules. Mon père nous faisait ça a moi et mes frères !

Ce serait sûrement très drôle mais c’est interdit !

Ah non mais pas clap sur les fesses, non, clap une mule contre l’autre.

Il est interdit de courir dans le village par ordre du colonel allemand ! Vous ne le saviez pas ?

C’est a dire que ici je ne cours jamais, j’ avais renoncé mais j’ai recommencé ce matin !

Attention Moustachat, nul n’est censé ignorer la loi ! Si vous croisez une patrouille !

Les allemands s’occupent de déplacer leurs canons ! Pas de nous !

Moi je ne vais pas vous empêcher de courir si vous avez envie de courir mais promettez moi que si vous entendez « stop », vous stopperez immédiatement !

Ça veut dire oui ?

Vous faites ce que vous voulez du moment que c’est habillé ! Attendez : je vérifie qu’il n’y ai pas de patrouille !

Il n’y a personne ?

Pas un chat !

Allez y mon père ! Clapez ! Je peux vous appeler mon père ?

Ce serait un honneur !

Je suis prêt ! Vous compterez !

Oui ! Vous pourriez revenir en marchant ? Je suis facilement soucieux.

Le clap ! Emmanuelle ! Le clap !

Attendez ! Vous avez une pâquerette dans votre barbe. 

Oui comme votre empereur !

On a un empereur ?

Non mais il y a mille ans, a la barbe fleurie !

Ah ! Charlemagne, je n’y étais pas du tout !

La conquête de la Germanie ! Les maures repoussés de l’Espagne.

Qu’est ce que vous faites ? Non : gardez votre pantalon ! Tout le village va vous voir !

A travers un trou dans les volets, ça ne compte pas !

D’accord ! Mais gardez votre chemise ! Elle vous tombe jusqu’aux genoux et je trouve ça très bien !

Et sans ? Comment vous me trouvez ?

Oh non ! Moustachat, pourquoi vous nous faites ça ?

Parce que sur moi elle gène et que sur vous elle sert ! Le clap mon père : j’attends !

Je viens avec vous ! Habillé avec votre chemise jusqu’aux genoux !

Et je dois garder mon pantalon ? Parce qu’il me gène beaucoup !

Comme ça je suis sûr de pouvoir vous plaquer si quelqu’un vous tire dessus.

Je ne vous veux pas derrière moi : le corbeau va dire que vous me courez après !

Je vous passerait devant.

J’aimerai bien voir ça !

Alors remettez votre chemise. Je mets votre pantalon !

D’accord je pars sans clap !

Moutchatcha votre pantalon ! Vous n allez pas montrer votre cul a tout le village !

Alors là je vous arrête !

Oui ! Et arrêtez vous aussi !

Je ne suis pas nu ! Pour qui vous m’avez pris ?

Je ne savais pas j’avais les yeux fermés

Et vous imaginiez ?

Bon d’accord ! Je l’avoue : je vous ai cru tout nu !

Dans mon pays on me gonflerait comme un mouton pour ça ! Sans m’égorger d’abord !

Ne poussez pas Mouchtachat !

Et même un mouton aurait plus de valeur non seulement a leurs yeux mais aussi aux miens !

Oui on ne montre pas son cul au curé sur le parvis de l’église !

Jamais vous ne me verrez nu ! J’ai la plus grosse culotte que vous aillez jamais vu !

Oui je me suis toujours dit que votre pantalon pouffait un peu ! Vous êtes enturbanné du nombril jusqu’aux genoux !

Les hommes qui montrent leur cul aux hommes, les allemands seraient pour les mettre dans des camps !

Ici on est encore en France ! On n’ arrive pas a de telles extrémités !

Heureusement pour Pinpon !

Mais enfin Pinpon n’a rien fait ! Et si c’était le cas il faudrait d’abord qu’ils le prouvent !

Comment ça il n’a rien fait ? Ce ne serait pas lui qui aurait donné de l’herbe du diable a Fanfan ?

Mais non mais non : je sais qui c’est et je vous assure que ce n’est pas Pinpon ! Ils s’en sont juste procuré pour adoucir le départ du mouton !

Mais pinpon il va le montrer a Fanfan : ils s’entendent comme cul et chemise !

Fanfan part faire ses études a Rome début septembre. Il attend que la fête soit passée pour officialiser.

Et il reviendra quand ?

Pour Noêl ! Quinze jours.

Mais après ? quand  est ce qu’il revient ?

Deux mois l’été prochain.

Quand est ce qu’il revient définitivement ?

Si c’est la volonté de Dieu, ça se fera ! Aujourd’hui le vœu de Fanfan est de devenir curé !

Il va nous faire Ulysse comme vous ? Dix sept ans ! C’était long !

Mais vous n’étiez pas encore là quand je suis parti ?

Il y a pas des écoles de curé a Marseille ?

Toc toc toc

Ouvrez moi je ne suis pas a l’aise il y a un bourdon qui tourne autour de moi !

Ah ! On a enfermé Monsieur le maire  dans le clocher !

Vous n’avez pas remontée la corde de la cloche qui pendait a l’extérieur !

Mais il l’aurait faite sonner !

C’est vrai qu’il est lourd !

Mais non : la preuve ! Il va falloir annuler la course !

J’y vais ! je n’ai vraiment pas envie de courir avec lui ! Il vous faut du ciment ?

Pour quoi faire ?

La nouvelle vierge ! Pour la procession de demain !

Ah oui ! Merci Je vais la faire en caoutchouc !

Et une en chair et en os comme Madeleine a la crèche de Noël ?

Malheureusement ça ne se fait pas ici !

Vous direz au cardinal que vous ne le saviez pas ! Clap !

Moustachat non ! Attendez Monsieur Poireau, je vous ouvre, j’ai un petit problème avec ma ma robe !

Un.

Mouchetabac m’a prêté ses vêtements ! J’enfile sa chemise et je vous ouvre !

Deux.

J’ai perdu mes clés mais je vais quand même essayer de vous libérer !

…Scri…scri…scric…

trois.

Non je n’y arriverai pas ! Je vais chercher Mouchtabac !

..quatre

Ah ! Non tout va bien il passe a peine les marches du parvis !

…cinq

Hein ! Mais attendez : il court super vite ce… cet … Olympien ! Poussez vous j’enfonce la porte !

Six….

Mais ma parole ! C’était ouvert ? Pourquoi vous n’avez pas essayé d’ouvrir plus tôt ? Avant d’appeller au secours ?

Sept.

Une seconde Monsieur poireau : je reviens ! Moustafa, Attendez moi ! Ce n’est pas du jeu !

Huit !

PAN !!!!!!!

Oh putain !